De la rage sans espoir au martyr, penser la complexité du jihadisme par Alain Bertho, animé par Pierre-Alain Guyot

Lundi 9 mai 2016, à partir de 18H Salle Pétrarque, 2 place Pétrarque à Montpellier

Les querelles récentes autour de l'expression « islamisation de la radicalité » initialement proposée par Alain Bertho traduisent notre difficulté à penser avec des mots anciens la complexité du réel et de l'horreur. Il nous appartient ainsi de revenir sur le terme radicalisation qui relève davantage d'une catégorie de police que de celle de la pensée. Mot-valise, il ne permet pas de penser les spécificités de l'engagement jihadiste.
Les manifestations de révolte et de rage que l'on peut observer de façon croissante depuis une quinzaine d'années sont liées aux effets de ce que l'on nomme "mondialisation". Cette colère se cherche un sens depuis la fin du communisme et l'abandon de l’hypothèse révolutionnaire. « Le monde est nu » et l’épuisement de la politique moderne, l’impuissance politique, la perte de crédibilité de la parole publique nous confrontent à l’absence d’espérance. Lorsque le politique reflue, la religion afflue. En France, la confessionnalisation de la colère est la conséquence, et non la cause, de la gestion par le politique des émeutes de 2005. Daech donne ainsi aujourd'hui forme et sens aux diverses rages, une signification à la mort, au bien et au mal, sans perspective d'espoir et de transcendance. Il s'agit donc de penser les ressorts de l'adhésion au jihad, au delà de la logique purement religieuse.

Par Alain Bertho, Professeur d'anthropologie à l'université de Paris-VIII, directeur de la Maison des sciences de l'homme Paris-Nord. Ses travaux portent sur le changement d'époque que constitue la mondialisation (Bertho A., Nous autres, nous-mêmes, ethnographie politique du présent, Paris le Croquant, 2008 (144 p.). Il a récemment publié Les Enfants du chaos - essai sur le temps des martyrs, La Découverte, 2016. Son site est le suivant : http://berthoalain.com/author/berthoalain/

Lire la tribune d'Alain Bertho parue dans Libération le 24 mars 2016